Rallye de France : hypnose préfectorale

Tel le serpent Kaa dans Le livre de la jungle de Rudyard Kipling, ci dessus dans l’adaptation de Walt Disney, le Rallye de France exerce un pouvoir hypnotique sur ce qu’on appelle faussement nos « élites ». C’est ce que vient encore de confirmer, certes un an après les faits, la décision du Tribunal administratif de Strasbourg mettant l’Etat à l’amende pour avoir illégalement autorisé, en 2011, les atterrissages d’hélicoptères VIP dans des zones protégées de la Vallée de Munster et du Grand Ballon d’Alsace. Il donne ainsi raison à l’association Alsace Nature qui avait porté plainte. Ce pouvoir de sidération justifie à lui seul la manifestation « masse critique » dont nous avons déjà parlé. L’épithète critique que nous avions interprété comme devant signifier suffisant pour est bien sûr aussi à prendre, on le voit ici, au sens de réveil de l’hypnose.
Deux sociétés proposaient des transports en hélicoptère sur le parcours du rallye, dont Loeb Events, gérée par l’épouse du pilote de rallye Sébastien Loeb.
Lors de l’audience le 19 septembre 2012, la préfecture avait expliqué avoir autorisé les hélisurfaces à des fins de sécurité et qu’elle n’avait eu connaissance de ces pratiques commerciales qu’après la fin de l’épreuve automobile.
Dans ses conclusions, le tribunal a estimé qu’au vu de différent compte-rendus de réunions, « les préfets ne pouvaient ignorer l’utilisation des hélisurfaces à des fins de loisirs et pas uniquement de sécurité ». Mais c’était compter sans l’hypnose.

«Masse critique»
samedi 29 septembre à 15h devant la gare centrale de Mulhouse
«NON au Rallye, OUI à plus d’argent public ailleurs !»

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Boycott de la mission Lescure sur l’Hadopi

Nous avions déjà évoqué le mauvais signal que constituait la nomination, par François Hollande, de Pierre Lescure comme successeur de son ancien bras droit Denis Olivennes à la tête d’une énième commission pour la réforme de l’Hadopi, la nouvelle gendarmerie (privée) de l’Internet dans la mesure où il s’agit une nouvelle fois d’un représentant fut-il de gôche- et ami du président – des industries culturelles là où l’on attendait une personnalité moins dépendante des intérêts de cette industrie.

Selon Wikipedia, Pierre Lescure est administrateur de la société Havas, dont le patron, Vincent Bolloré a de grandes ambitions dans le domaine des média, et accroît régulièrement ses parts dans le groupe Vivendi-Universal. Pierre Lescure est administrateur du groupe suisse Nagra, qui a mis au point les décodeurs Canal+. Dans son dernier rapport annuel, le groupe Nagra-Kudelski indique que « parmi les opportunités de développement identifiées, le Groupe Kudelski a pris la décision d’investir de façon sélective dans les deux secteurs que sont la cybersécurité et la valorisation de la propriété intellectuelle ». Pierre Lescure prépare enfin l’avènement de la télévision dite connectée, une combinaison de la télévision avec les technologies des réseaux sociaux, nouveau pas vers le libre abrutissement de soi-même par soi-même.

Dans une tribune parue dans Libération La Quadrature du Net, UFC-Que choisir et le Samup (Syndicat des artistes, musiciens, chanteurs, danseurs et enseignants) publient les raisons de leur boycott après avoir attendu en vain d’avoir des raisons d’un autre choix. Nous reproduisons ci-dessous leur texte qui laissera Pierre Lescure seul avec un groupe de technocrates chargé de faire des compte rendus d’audition.

Pourquoi nous ne participerons pas à la mission Lescure

TRIBUNE – Par Philippe AIGRAIN Cofondateur de La Quadrature du Net, Alain BAZOT Président de l’UFC-Que choisir et François NOWAK du Syndicat des artistes, musiciens, chanteurs, danseurs et enseignants (Samup).

« Le numérique révolutionne la culture. Internet est un gigantesque laboratoire de nouvelles formes de création, un lieu d’interaction entre des créateurs dont le nombre s’est fortement accru et des publics qui n’acceptent plus qu’on les traite en récepteurs passifs de contenus préformatés. Malgré cela, on s’est obstiné à ne considérer le numérique que comme un canal de distribution pour les produits raréfiés des industries culturelles traditionnelles et à traiter les citoyens numériques comme des pirates à réformer. A l’opposé, depuis sept ans, nous travaillons à la construction d’un nouveau pacte entre créateurs et citoyens, consommateurs et usagers d’Internet.

La plateforme qui réunit nos organisations, Création – Public – Internet a proposé de construire ce pacte sur deux piliers : la reconnaissance du droit des individus à partager entre eux les œuvres numériques sans but lucratif, et la mise en place de nouveaux financements destinés à rémunérer les créateurs et à apporter des ressources supplémentaires à la production de nouvelles œuvres et à l’environnement de la création. Nous sommes confrontés à une situation révoltante.

Pour la troisième fois en cinq ans, la mission de définir les orientations des politiques portant sur la culture et Internet est confiée à une personne fortement impliquée dans les intérêts privés de la production, distribution et promotion des médias. Après Denis Olivennes, PDG d’une société dont la distribution de musique était l’une des activités, après Patrick Zelnik, PDG d’un label phonographique, voici Pierre Lescure qui siège au conseil d’administration ou de surveillance de Havas, de Lagardère et de deux sociétés qui jouent un rôle essentiel dans les dispositifs de contrôle d’usage des œuvres (DRM) : Kudelski et Technicolor. On pouvait penser qu’avec le récent changement de majorité, on mettrait fin à ce type de privatisation de la préparation des politiques publiques. Mais lorsqu’on interroge Pierre Lescure sur sa nomination, il invoque deux qualités pour la justifier : ses relations amicales avec le chef de l’État (qui lui ont permis de proposer ses services), et la connaissance des distributeurs et producteurs qu’il doit précisément aux conflits d’intérêt qui devraient interdire de le nommer. L’un de nous a accepté de rencontrer informellement Pierre Lescure avant le démarrage de sa mission. Il lui a transmis nos propositions de « licence pour le partage » et la plateforme couvrant le champ plus large de la réforme du droit d’auteur et des politiques culturelles, préparée par la Quadrature du Net. Seul résultat de ce dialogue, la reprise par Pierre Lescure, dans ses interventions, de l’expression légalisation du partage non marchand dans un sens perverti. Là où nous y voyons un droit culturel essentiel s’appliquant à toutes les œuvres numériques, il n’y voit qu’une source de monétisation complémentaire des fonds de catalogue qui ne se prêtent pas à être promus comme des savonnettes.

Une telle approche ne mettrait en rien fin à l’absurde guerre au partage non marchand, et nous promettrait de nouvelles Hadopi, ou la même. L’étroitesse de vue de la mission ne se limite pas au partage non marchand. Quelle attention sera portée aux conditions de l’acte créatif, à la culture vivante qui se développe sur Internet ? Quelle attention sera portée à la refonte, et non au simple maintien, d’une exception culturelle dont de nombreux signes montrent l’essoufflement ? Seul semble importer la survie d’un modèle d’industries de distribution culturelle dont les auteurs, artistes et techniciens sont le dernier souci. La culture, les divers médias non-audiovisuels, Internet et les citoyens méritent mieux qu’une mission dont le sujet principal d’intérêt est la télévision connectée.

L’organisation même de la mission ne vaut pas mieux. Pierre Lescure sera seul, avec un groupe de technocrates sans voix propre, pour décider de ce qu’il retient des auditions. La première phase de la mission (juillet-septembre !) visait un état des lieux, qui a été confié aux seuls membres de l’équipe technique, sans aucun échange contradictoire ni cadre officiel. Nous ne cautionnerons pas cette caricature de débat démocratique, et nous ne nous rendrons pas aux invitations reçues pour des auditions. Alors que M. Lescure a des idées bien arrêtées sur chacun des sujets devant pourtant faire l’objet de débats, il est de notre devoir, en tant que constructeurs constants d’un dialogue entre auteurs, artistes et citoyens de tirer la sonnette d’alarme et de défendre nos propositions dans l’espace public sans cautionner sa privatisation. Nos propositions sont sur la table. A tous de se les approprier, de les critiquer ou de les soutenir ».

Source : La Quadrature du Net
Voir aussi la mise en perspective du texte par l’un de ses auteurs, Philippe Aigrain, sur son site.

 

 

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« Masse critique » contre rallye vroum vroum

Alors que la conférence environnementale s’est achevée sans soulever d’enthousiasme (à part celui de Cécile Duflot), faisons un peu la promotion du vélo, avant le débarquement des zombies pétaradants qui font vroum, vroum. Et en attendant de comprendre pourquoi il faut dépenser des millions pour consolider une centrale nucléaire que l’on a décidé de fermer et de savoir comment sera extrait le gaz de schiste. Le président de la République a condamné la fracturation hydraulique mais pas le gaz de schiste en soi. Cette façon d’utiliser certains mots pour faire accroire qu’on en utilise d’autres est de mauvaise méthode.

Et on attendra donc de se réjouir de la nouvelle de fermeture pour la Centrale nucléaire de Fessenheim que la loi soit votée. Il vaut mieux d’ici là ne pas baisser les bras car de puissants lobbies n’ont pas renoncé et restent à l’œuvre comme en témoigne la touchante sollicitude des directeurs de centrales nucléaires envers leurs salariés. On peut noter également que, dans le discours de François Hollande, la fermeture de Fessenheim va de pair avec la promotion du nucléaire. Il semblerait qu’il y ait probablement un malentendu sur le sens même de l’expression transition énergétique.

Demain, c’est PARK(ing) DAY

PARK(ing) DAY est un événement mondial ouvert à tous qui a lieu, le 3e week-end de septembre, durant lequel citoyens, artistes et activistes collaborent pour transformer temporairement des places de parking payantes en espaces végétalisés et conviviaux.
Mulhouse est pour la première fois modestement de la partie. Le jour, un vendredi, n’est pas forcément le mieux choisi, ça fait un peu bobo privilégié. A propos de bobo, l’autre jour quelqu’un m’a traité d’écolo bobo. Mais je me suis dit : venant d’un coco rétro… . Les informations sur le park(ing)day sont difficiles à obtenir à moins, peut-être, qu’il faille pour cela vendre son âme à Facebook, à quoi je me refuse. Néanmoins, j’aime bien ce genre d’initiatives, je l’ai déjà dit, de réappropriation citoyenne de l’espace public.
Rendez-vous donc vendredi 21 septembre, place Franklin de 14 à 16h.
Vous pourrez vous aussi apporter du thé, si le cœur vous en dit ! du thé, des verres/gobelets, et des chaises pliantes. Et relayer l’info

Opération « Masse critique » contre Rallye de France

Alors que la semaine de la mobilité douce n’est pas terminée (le 22 septembre), on voit déjà fleurir la propagande pour le Rallye vroum vroum magnifiquement sponsorisé par Total, Crédit Mutuel , RedBull et Play Station et soutenu par des aides publiques de plus d’un million d’euros. 404 km de courses dans toute l’Alsace entre le jeudi 4 octobre et le dimanche 7 octobre. Une spéciale, pardon une super spéciale, se déroulera à Mulhouse comme l’année dernière autour du Palais des sports, le vendredi 5 octobre 2012. Subvention municipale 100.000 euros sans compter les autres coûts pour la mobilisation des services de la Ville. Non seulement ces gens sont largement sponsorisés mais ils détournent de la collectivité de l’argent qui serait bien plus utile ailleurs. Et pour un piètre résultat. Le passage de projectiles publicitaires plus ou moins colorés atteint tout de même au non-spectacle par excellence, encore plus pour ceux – les plus nombreux – qui, massés derrière des grillages, n’ont pas le privilège de le voir du haut d’un hélicoptère ou depuis une tribune. Le rallye devient alors le spectacle de ceux qui vont voir un spectacle qui n’en est pas un. On souligne peu un autre paradoxe : lancer des bolides à vitesse maximale dans un quartier dont la vocation est d’être une zone à 30 km/h. On note aussi que des subventions publiques sont accordées pour que le rallye fasse une assez choquante promotion …du bénévolat pour la manutention, la logistique, l’accueil, la sécurité (sic), l’intendance. Pour finir, je renvoie au texte que nous publiions l’an dernier Du rallye comme propédeutique à la vulgarité qui se concluait en ces termes :

« Que le rallye entraîne des nuisances environnementales, que les dépenses qu’il entraîne constituent en ces temps de crise financière un scandaleux mésusage de l’argent public est chose entendue ; encore faut-il souligner les nuisances sociétales et mentales induites par de tels spectacles. En promouvant une manifestation barbare, en donnant pour exemple à notre jeunesse un champion tous azimuts de l’expatriation fiscale, c’est une pédagogie négative que pratiquent nos élus, une propédeutique à la bêtise, à la vulgarité et à l’incivisme dont ils feindront ultérieurement de déplorer les trop prévisibles conséquences».

Aussi pour manifester l’opposition au rallye de France et pour demander plus de mobilité douce, une manifestation dite « masse critique » est organisée samedi 29 septembre à 15h devant la gare de Mulhouse. A pied, à vélo, en roller, en tram ou en train, il s’agit d’atteindre la « masse critique » dans ce nœud de l’intermodalité. Cette action s’inscrit dans les actions du collectif ras-le rallye avec d’autres associations de Mulhouse et du Haut-Rhin. Ce terme de « masse critique » qui dans son acception sociale désigne une manif à vélo est finalement assez intéressante. On pourrait l’étendre aux autres domaines évoqués en utilisant l’épithète critique au sens de suffisant pour. Il s’agit à chaque fois d’être suffisamment nombreux pour passer les feux rouges.

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