Fessenheim, encore une promesse que ne sera pas tenue

Le Monde daté du 19 juillet 2013

Nous suivons depuis longtemps le travail de sape du lobby pronucléaire en France, syndicats compris, pour obtenir le renoncement à la promesse du Président de la République de fermer la vieille centrale nucléaire de Fessenheim, gage d’un vrai engagement vers la transition énergétique.

Il arrive sans doute au bout de ses efforts comme le titre Le monde d’aujourd’hui.

Si cela a pu se faire c’est parce que, comme le souligne le quotidien, “l‘Etat, actionnaire à 85 % du groupe électrique – une entité de droit privé cotée en Bourse -, n’est jusqu’ici guère monté au front“.

Les combats qu’on ne mène pas sont bien entendu perdus d’avance.

Arrêt d’une pompe du circuit primaire de la centrale nucléaire de Fessenheim

COMMUNIQUE DE PRESSE de Jean-Marie Brom et du Réseau « Sortir du Nucléaire »

Comme d’habitude, avec quelques heures de retard, EDF a annoncé que

« Le 2 juillet à 9h10, l’arrêt d’une pompe du circuit primaire de la centrale nucléaire de Fessenheim a entraîné un arrêt automatique de l’unité de production n° 2″.

Et comme d’habitude, sans même savoir à quoi était dû cet arrêt de pompe, EDF a annoncé que cet incident était « sans conséquence pour l’environnement ou la sécurité ». Voire…

Il faut savoir qu’une pompe primaire est un monstre de près de 100 tonnes, fonctionnant à très haute vitesse (près de 1500 tours/minutes), pompant une eau à haute pression (plus de 50 bars), chaude (260°C) et très chargée en radioactivité.

Il faut savoir que l’arrêt brutal d’une pompe primaire induit un déséquilibre dans la température du réacteur (1/3 du volume n’est plus refroidi), ce qui peut provoquer un vieillissement accru du métal du réacteur dans la zone incriminée.

Il faut savoir que l’arrêt brutal d’une pompe tournant à 1500 t/mins n’est pas sans conséquences sur la robustesse future de cette pompe.

Que cette pompe se soir arrêtée à cause d’une défaillance d’alimentation ou en raison de son vieillissement, il est en tout cas bien trop tôt pour affirmer quoi que ce soit.

A peine un an après la visite décennale de ce même réacteur, cette panne sur un élément essentiel rappellera peut-être à l’Autorité de Sûreté Nucléaire qu’il y aura toujours un risque à vouloir prolonger au-delà du raisonnable cette centrale prévue pour fonctionner une trentaine d’années. Cette panne donnera peut-être à réfléchir à EDF qui se gobergeait il y a peu des excellent résultats financiers de Fessenheim pour l’année 2012.

Pour les associations qui suivent cette centrale depuis sa première divergence, la cause est entendue :

– Il ne doit pas être question d’envisager un quelconque redémarrage du réacteur n°2 avant que toute la lumière n’ait été faite sur les causes de cet arrêt de pompe, sur le déroulement précis de l’arrêt automatique, et surtout sur les conséquences potentielles de cette panne sur la robustesse du matériel, et sur son impact économique (tant les réparations que le manque à gagner).

– Compte-tenu des travaux exigés par l’ASN (radier et source froide) et de leur coût, et de la fermeture prochaine de la centrale (pour autant que l’on puisse croire aux promesses de François Hollande), la sagesse la plus élémentaire impose que ce réacteur soit mis immédiatement à l’arrêt de manière définitive.

Pour reprendre les termes même d’EDF, cela n’aura aucune « conséquence » : les deux réacteurs de la centrale de Fessenheim sont désormais à l’arrêt, sans aucun inconvénient pour l’Alsace, ou même la France. Et ce n’est pas la première fois (3 mois en 2011…).

 

L’histoire d’un nomade du nucléaire

L’industrie nucléaire a créé une catégorie de gens du voyage particulière appelés les ” nomades du nucléaires”. Ils vont d’un réacteur à l’autre pour y effectuer les tâches les plus pénibles et notamment celles soumises aux irradiations. EDF a par ailleurs des pratiques salariales curieuses notamment celle dite du prêt de main d’œuvre à but lucratif. C’est illégal et consiste en ceci : des entreprises complaisantes prêtent de la main d’œuvre à EDF, ce qui permet à l’électricien de ne pas leur appliquer le traitement statutaire.

Un récit du Canard enchaîné (cliquez sur la photo pour une lecture plus aisée) :

Le Canard enchaîné du 13/02/2012