Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le navet n’est pas un légume de série B.
Le navet a la réputation d’être un légume d’automne, voire d’hiver puisqu’il se conserve. C’est vrai. Mais il existe également nombre de variétés de navets de printemps (Blanc de Milan, Rouge plat hâtif, Blanc plat hâtif à feuille entière, Rond de Nancy et autres Demi long de Croissy). C’est l’élément de plein droit de la jardinière de légumes, qui signale l’approche de l’été, avec ses petites carottes et pommes de terre primeur, ses petits pois goûteux et croquants et ses feuilles de salade au goût marqué, pourvu qu’elles soient nés de naissance naturelle. Le navet nouveau lui donne alors toute sa personnalité.
De la même famille botanique que le chou, la rave ou le rutabaga qui a fait en France la légende alimentaire de la dernière guerre mondiale, notre Brassica napus rapa de printemps n’a quand même pas son pareil en matière de jutosité, de croquant et de saveur, pour peu que sa cuisson ne soit pas massacrée et que sa finesse soit respectée.
Il participe de nombreuses recettes : du célèbre canard au navet, jusqu’aux filaments de navets frits qui peuvent accompagner une viande et, surtout, décorer une assiette, en passant par les navets farcis du grand Escoffier ou par les petits navets et carottes au cumin accompagnant un filet mignon de porc grillé au miel et baies roses selon la recette de Pierre-Marie.Théveniaud.
Un peu d’histoire
Le navet était connu dès le néolithique (5000 ans avant J-C). Il était déjà consommé en Chine alors que les autres régions du monde, celle des deux fleuves par exemple (Tigre et Euphrate) privilégiaient les céréales. C’est le noble tubercule (la pomme de terre) qui l’a aujourd’hui relégué. Pour la petite histoire, il faisait, au XVIème siècle, l’honneur du haricot de mouton.
En effet le terme haricot ne désignait pas la petite légumineuse en forme de rein qu’on connaît, mais ce qui était coupé, la viande de mouton en morceaux, en l’occurrence. Il a fallu que Catherine de Médicis, pour les offrir à son fiancé le dauphin de France, amène dans ses bagages les fagioli, ces grosses graines en forme de rognon qui avaient été ramenées au pape Clémént VII dans les années 30 – de 1500 ! -, et qui sont alors devenus “fayouns” pour qu’ils remplacent le navet dans le haricot. Mais le terme de haricot tel qu’on le connaît donc maintenant n’est cependant arrivé sur le marché que plus tardivement, c’est-à-dire en 1640 dans le lexique d’Oudin. Cela dit le navet s’est en partie défendu et on peut le retrouver dans certaines recettes du navarin d’agneau dont le nom ne viendrait paradoxalement pas de navet mais de Navarre.
Son intérêt nutritionnel
Au XVIIème siècle, on lui attribuait un certain nombre de vertus, dont celle de combattre la mélancolie tout en chassant l’odeur nauséabonde des aisselles !
Moins poétiquement, on peut lui attribuer les caractéristiques suivantes :
- faible apport énergétique (34 Kcal, soit 142 KJ pour 100g)
- apport intéressant en vitamine C (28 mg pour 100g et encore 18 mg pour le navet cuit)
- apport non négligeable en calcium (60 mg pour 100g)
- un peu de fibres bien que moins que dans d’autres légumes (2 g pour 100 g)
- une teneur élevée en potassium (140 mg pour 100 g) à laquelle doivent faire attention les insuffisants rénaux
Préparation du magret de canard :
Faire mariner 2 ou 3 heures les magrets sur la face peau dans un fond d’huile d’olive. Bien tapisser de poivre de Sichuan. Bien enduire la face chair d’huile d’olive (faire pénétrer par massage, recouvrir de grains de poivre en appuyant bien. Cuire le magret de façon traditionnelle en le posant d’abord côté peau (sans enlever les grains de poivre collés) à faible feu de façon à faire fondre la graisse. Augmenter le feu pour griller un peu la peau. Le tout doit durer une dizaine de minutes. Jeter le gras et retourner le magret pour le cuire 5 à 6 mn côté chair (également avec les grains de poivre). Laisser reposer quelques minutes pour que la chaleur se répartisse bien par conduction à travers l’épaisseur du magret et que la couleur rosée s’uniformise.
Préparation des navets :
Choisir des navets très frais pour qu’ils soient bien juteux et que la saveur reste bien fraîche (de façon à éviter une trop forte saveur de composés soufrés). Les éplucher, les tourner et les rincer rapidement. Les précuire à la vapeur ou au micro-ondes environ 8 mn de façon à ce qu’ils restent très croquants. Les égoutter et les passer à la poêle dans un fond d’huile d’olive à feu d’abord un peu vif pour juste les blondir en surface. Parsemer de piment d’Espelette. Baisser le feu et les laisser fondre en rajoutant un tout petit peu d’eau de cuisson de façon à ce qu’ils ne colorent pas (une dizaine de minutes environ). Arrêter la cuisson de façon à ce qu’ils soient fondant et juteux mais restent quand même croquants, respectant ainsi son paradoxe de naissance.
Dressage
Les cuissons doivent se terminer en même temps. Découper alors le magret en lamelles de 2 à 4 mm d’épaisseur. Mettre au centre de l’assiette un navet. Disposer le magret en rosace. Servir les navets d’accompagnement en pyramide sur une petite assiette d’accompagnement.
Pierre-Marie Théveniaud