Pendant ce temps…. “l’union sacrée”

Pendant ce temps, le Parti socialiste de Strasbourg et l’UMP (et affiliés) de Mulhouse mettent en place en dehors de toute concertation avec les populations – ni même, semble-t-il, avec  les dirigeants des petites et moyennes entreprises – ce qui va structurer l’avenir de la région quelle que soit l’issue des élections. C’est l’union sacrée entre Catherine Trautman et Jean-Marie Bockel. Vous avez-dit démocratie ?

Voici ce qu’écrit le Journal des entreprises sous le titre “Strasbourg-Mulhouse l’union sacrée”

À elles deux, elles réunissent 40% de la population alsacienne. Dans le cadre de la Loi du 16 écembre 2010 autorisant certaines agglomérations à se rapprocher pour former un “pôle métropolitain”, Strasbourg et Mulhouse ont fait le choix de s’engager dans cette démarche. «À l’échelle de l’Europe, dans un contexte de mondialisation, nous pèserons plus en travaillant ensemble», confie Catherine Trautmann, vice-présidente de la Communauté urbaine de Strasbourg. Président de Mulhouse Alsace Agglomération (M2A), Jean-Marie Bockel ne dit pas autre chose: «Cela sera vrai notamment dans les négociations de plans État-Région. Les ressources publiques vont être de plus en plus rares et les pôles métropolitains permettront de concentrer les moyens». Cette initiative s’inscrit aussi dans un esprit de cohésion régionale alors que se profile à l’échelon supérieur, peut-être, un Conseil unique d’Alsace. Mais en dehors de la dimension purement politique et administrative, les enjeux, notamment sur le plan économique ou infrastructurel, sont aussi conséquents. «Si Strasbourg est clairement leader sur certains sujets, comme la filière santé par exemple, Mulhouse l’est sur d’autres, l’automobile, l’aéroportuaire…», explique Jean-Marie Bockel, «ce qui est essentiel, c’est que les leaderships qui émergent d’un côté bénéficient à l’autre partie». Et que les uns et les autres soient capables de mettre leur ego de côté: «Prenez les cuves fabriquées par Alstom à Belfort», explique Catherine Trautmann, par ailleurs présidente du Port autonome, «elles sont acheminées par la route jusqu’au portique colis lourds de Strasbourg. Il faut aussi être capable de reconnaître qu’elles pourraient s’arrêter à Mulhouse. On peut avoir une discussion là-dessus». De son côté, Jean-Marie Bockel affirme être partisan d’une fusion des universités, avec pour le coup une forme de leadership de Strasbourg. «Seuls, nous n’y arriverons pas. Mais en jouant les pôles d’excellence de part et d’autre, nous avons tout à y gagner», explique-t-il. Une forme de synthèse de la pensée dominante dans ce rare moment de communion interagglomérations. PÔLE MÉTROPOLITAIN

Sources  ici et là 

On savait déjà que l’Université de Haute Alsace allait se mettre sous la coupe de l’Université de Strasbourg, ça ne se discute même pas. Là, on apprend que le partage des rôles est en cours. La santé à Strasbourg, l’automobile – si pleine de promesse d’avenir ( ?)- à Mulhouse. Le tout simplement pour des raisons de ressources publiques qui s’amenuisent, ce qui est loin d’être la meilleure des motivations. On remarquera qu’il n’y a rien sur un sujet aussi essentiel que la question des énergies du futur. En général le fusionnel conduit au conflictuel. Surtout dans un dangereux déni de démocratie permanent. Cela  risque en plus d’être tout à fait à contre courant. Il n’est pas certain que l’avenir soit dans le big is beautiful. On semble oublier, qu’à l’ère d’Internet et des réseaux, le plus petit village peut aujourd’hui se placer mondialement à condition de savoir se singulariser. Les technologies d’une telle individuation sont désormais disponibles.

Du rallye comme propédeutique à la vulgarité

Les rallyes se suivent mais ne se ressemblent pas au sens où d’année en année, ils passent moins bien. En témoigne, une prise de position d’universitaires parue dans les DNA du 30/09/2011 que je trouve en ceci particulièrement intéressante qu’elle n’oublie pas d’évoquer les nuisances sociales et sociétales et les vertus pédagogiques que devraient avoir les actes politiques. Nous savons sans doute mieux à faire, en effet, que d’introduire les jeunes générations dans la religion de la voiture. J’ajoute après la “spéciale” de ce rallye qui a eu lieu à Mulhouse, ce samedi 1er octobre, après midi, deux autres considérations.  Le passage de projectiles publicitaires plus ou moins colorés atteint tout de même au non-spectacle par excellence, encore plus pour ceux – les plus nombreux – qui, massés derrière des grillages, n’ont pas le privilège de le voir du haut d’un hélicoptère ou depuis une tribune. Le rallye devient alors le spectacle de ceux qui vont voir un spectacle qui n’en est pas un. Le second aspect peu souligné concerne le fait que l’on atteint le sommet du paradoxe  quand on lance des bolides à vitesse maximale dans un quartier dont la vocation est d’être une zone à 30 km/h.
Nous reproduisons ci dessous le texte évoqué non sans avoir exprimé notre étonnement de voir que des universitaires à ce niveau d’instruction fassent encore l’erreur classique de confondre Panurge et ses moutons.
Pour marquer notre différence avec ceux qui le publie dans un environnement publicitaire qu’il soit de voitures automobiles ou autre, nous nous abstenons de la moindre image.

 

La prise de position :

“Du rallye comme propédeutique à la vulgarité”

«Dans le sens le plus noble du terme, défini par Platon à l’orée de notre culture, la politique se voulait une pédagogie. Pour le poète allemand Friedrich Schiller, qui écrivait aux temps de la Révolution française, elle devait s’accompagner d’une éducation esthétique du citoyen. L’obstination de nos élus à reconduire d’année en année leur soutien à la plus nocive et la plus débile des manifestations sportives va précisément à l’encontre de ces idéaux. Elle donne en revanche l’exacte mesure des pressions exercées sur la politique par l’industrie automobile et son appendice médiatique : la Fédération française de sport automobile, avec son incessante apologie des exploits mécaniques et son inepte célébration des petits as du volant.

Salaires indécents

Depuis sa naissance, la course automobile a en effet partie liée avec les groupes industriels qui la promeuvent et sans laquelle elle ne pourrait exister. Entrent réellement en compétition moins des individus talentueux que des firmes commerciales en quête de valorisation publicitaire, ce qui explique en retour les salaires indécents versés à leurs laquais. Chacun peut s’en rendre compte, une voiture de course n’est qu’une surface publicitaire ambulante et son conducteur un homme-sandwich, de la casquette aux baskets.

Nul n’ignore qu’une compétition automobile est un condensé de nuisances (visuelles, sonores et olfactives) entées sur une débauche insensée de ressources énergétiques. C’est donc avec une égale débauche de cynisme que l’on tente présentement de gommer cette dérangeante réalité en essayant de nous vendre l’oxymore d’un rallye propre, à grand renfort de «bilan carbone» basé sur une évaluation que l’on avoue par ailleurs «fragilisée par les difficultés méthodologiques » (souhaitons bon courage aux gentils évaluateurs).

De ces noces obscènes de l’industrie et de l’argent sous l’égide du spectacle, on prétend faire «une vraie fête populaire». Il est difficile de pousser plus loin le mépris du peuple, ainsi déchu au rang de consommateur passif de réclames commerciales et ramené au statut de plèbe urbaine à laquelle on fournit, pour l’amadouer, « panem et circenses», du pain et des jeux imbéciles. Consultons plutôt un bon dictionnaire pour y lire, à l’article Démagogue: «Politicien qui flatte les passions de la multitude pour gagner sa faveur». Quoi de plus démagogique à cet égard que le slogan «tous derrière Loeb !», repris en chœur par les Panurges de tous bords. On rirait de cette grotesque incitation au grégarisme, si la formule n’évoquait des suivismes autrement inquiétants.

À cet égard, le comble de l’incohérence est atteint par une élue arguant de la popularité du rallye pour dénoncer la démagogie de ceux qui s’y opposent ! En démocratie, libre à chacun d’exprimer ses opinions ; mais il n’est permis à quiconque de disposer à sa guise du sens des mots, ni de renverser à sa convenance la logique la plus élémentaire.

Politique de Jocrisse

La revendication d’un rallye éco-compatible n’est pas seulement un non-sens, mais une insulte à l’intelligence des citoyens ; quant à la garantie d’une «compensation aux gaz à effet de serre» émis par une manifestation qu’il suffisait de ne pas financer, elle relève d’une politique de Jocrisse. Les dispendieux cabinets de communication auxquels nos élus ont recours se passent le truc: en Alsace, on amène les bolides dans des vignes en voie de certification biologique en excipant d’un «village du développement durable» placé sur le parcours ; à Nantes, on envisage froidement de raser une quarantaine d’exploitations agricoles pour installer un aéroport surdimensionné intégrant une « ferme modèle» ! Orwell n’aurait pas trouvé mieux.

En agissant de la sorte, nos décideurs se rendent coupables d’un méfait qui dépasse en gravité les séquelles écologiques précédemment évoquées. Que le rallye entraîne des nuisances environnementales, que les dépenses qu’il entraîne constituent en ces temps de crise financière un scandaleux mésusage de l’argent public est chose entendue ; encore faut-il souligner les nuisances sociétales et mentales induites par de tels spectacles. En promouvant une manifestation barbare, en donnant pour exemple à notre jeunesse un champion tous azimuts de l’expatriation fiscale, c’est une pédagogie négative que pratiquent nos élus, une propédeutique à la bêtise, à la vulgarité et à l’incivisme dont ils feindront ultérieurement de déplorer les trop prévisibles conséquences».

Les signataires
Yann Bugeaud, membre de l’Institut universitaire de France
William Gasparini, directeur du laboratoire Sciences sociales du sport
Pierre Hartmann, directeur de l’Ecole doctorale des Humanités
Roland Pfefferkorn, directeur de l’Institut de sociologie
Maurice Sachot, professeur émérite en Sciences de l’éducation
Stéphane Vuilleumier, responsable d’équipe en microbiologie de l’environnement au Centre national de la recherche scientifique.