Roms : la commune humanité bafouée

Nous ne l’avions pas accepté du gouvernement précédent, comment pourrions nous l’accepter de l’actuel ? Etienne Balibar, Eric Fassin, Danielle Lochak, Cécile Cornut, Isabelle Saint Saens, Chistophe Mileschi, Sophie Wanish, Thomas Lacoste, Marie Gaille, Cécile Kovàcshàzy Luc Boltanski, et Serge Guichard ont élaboré un texte dans lequel ils reprochent au gouvernement socialiste la « banalisation de la xénophobie et du racisme par l’État français ». Ci-dessous le texte. Il est accompagné d’une pétition

Le nouveau gouvernement a choisi la continuité avec l’ancien : la politique d’expulsion des camps de « Roms » étrangers continue de plus belle. Aux mêmes motifs. Avec à peu près les mêmes mots, les mêmes images. Avec les mêmes présupposés et les mêmes conséquences. À commencer par l’ethnicisation de familles issues de lieux et d’histoires multiples, qui ne se reconnaissent pas nécessairement de destin commun, sauf celui auquel on les assigne : le cercle vicieux de la misère et de l’exclusion.

Cela, nous ne voulons, nous ne pouvons pas l’accepter. Il y a deux ans, il importait déjà de se dresser en opposition à la politique de stigmatisation et de persécution menée sous la houlette de Nicolas Sarkozy, dans l’esprit du discours de Grenoble, contre les Roms et les gens du voyage. C’est avec la même détermination que nous nous élevons aujourd’hui contre la politique menée aux dépens des Roms sous la responsabilité du président de la République et de son premier ministre par leur ministre de l’Intérieur.

Manuel Valls renoue en effet avec une rhétorique qui avait mené un de ses prédécesseurs à la présidence de la République, et la République au bord de l’abîme. Or combien sont-ils, ceux qu’on veut expulser ? 12 000 ? 15 000 tout au plus ? Sont-ils à ce point une menace pour l’ordre public qu’il faille impitoyablement les déloger sans solution de rechange ?

Si les nouveaux responsables invoquent autant la sécurité que les anciens, ils revendiquent (à l’instar de François Hollande pendant la campagne) un juste milieu entre « fermeté » et « humanité ». Mais qui peut croire que c’est pour leur bien qu’on détruit le lieu de vie de ces migrants ? En tout cas, pas les premiers intéressés. Car ils l’ont vite compris : si l’on se souciait tant de leur bien être, on ne les abandonnerait pas ensuite à leur sort, en oubliant de les reloger. Ils ne font qu’aller un peu plus loin. S’ils parviennent à se cacher, c’est au risque d’être encore plus abandonnés à eux-mêmes et privés des droits sociaux les plus élémentaires. Déplacer ainsi les gens, c’est bien sûr redoubler leur précarité, et faire obstacle à la scolarisation de leurs enfants.

Certes, Jean-Marc Ayrault préconise la concertation. Mais sur le terrain (faut-il s’en étonner ?), ces engagements ne sont pas respectés. Des centaines de familles se retrouvent dans des situations inextricables. À Lyon comme à Lille ou à Marseille ou en région parisienne, le travail des associations de bénévoles a été ruiné en quelques heures. En Essonne, plusieurs expulsions de bidonvilles ont eu lieu sur arrêtés municipaux, sans solution de relogement réel. Dans de nombreux départements, trop de communes tentent de ne pas scolariser les enfants Roms.

La majorité gouvernementale croit-elle donc qu’en agitant les peurs sécuritaires, elle échappera au reproche de « laxisme » ? C’est tout le contraire : dans ce domaine, elle n’ira jamais assez loin. La droite, en attendant peut-être l’extrême-droite, fera toujours mieux, c’est-à-dire pire. La gauche gouvernementale le paiera donc cher, y compris dans les urnes. En tout cas, les sondages suggèrent déjà qu’elle n’y gagne rien . pas plus qu’hier la droite au pouvoir. Seul le Front national pourra récolter les fruits de cette politique.

En outre, les concessions au populisme identitaire et sécuritaire ne feront pas avancer le pays dans sa mobilisation citoyenne face à la dictature des marchés et aux destructions d’emploi, bien au contraire. S’en prendre aux Roms ne suffira donc nullement à gagner les suffrages populaires. Cela ne peut que diviser, affaiblir là où il faut rassembler, agir. Singer la droite ? C’est décidément un mauvais calcul.

Il ne suffira pas davantage de renvoyer cette réalité migratoire à son origine . en l’occurrence la Roumanie, ainsi que la Bulgarie. Comme dans de nombreux pays de l’Europe de l’Est, la violence ordinaire vis-à-vis des « Tsiganes » se poursuit et risque de s’intensifier à mesure que la situation économique se dégrade. En même temps, la légitimation par l’État français de leur caractère indésirable ne peut que renforcer ce racisme.

Surtout, plutôt que de faire peser cette migration sur les gouvernements nationaux d’origine, comme l’a fait le ministre de l’Intérieur, il faut faire valoir une responsabilité de l’Union au lieu de mettre en péril l’idéal européen en la réduisant aux politiques néolibérales sans même la caution des droits de l’homme. Bref, il faut que Viviane Reding, commissaire européenne aux Droits fondamentaux, parle haut et fort comme en 2010, et non qu’elle soit réduite au silence face à l’État français.

Nous ne ressentons pas moins d’indignation qu’alors ; en revanche, notre colère est plus grande. Pourquoi changer de Président, sinon pour changer de politique ? Or plus ça change, plus c’est la même chose : les Roms sont encore et toujours pris pour boucs émissaires. Au lieu de jouer à son tour sur les peurs et les ressentiments, ce gouvernement aurait pu faire le pari des valeurs démocratiques : la liberté et l’égalité, pour les Roms aussi. Nous en sommes loin. Après l’éviction de la droite éhontée, on assiste à l’avènement d’une gauche honteuse. Aujourd’hui, nous voulons donc interpeller la majorité gouvernementale :

Rien ne vous oblige à ce choix. Il est contraire aux principes que vous revendiquez ; pour autant, il n’est pas davantage dans vos intérêts. Votre responsabilité n’en est que plus grande. Nous vous tenons donc comptables aujourd’hui, comme l’histoire vous tiendra comptables demain, de cette banalisation de la xénophobie et du racisme par l’État français, au mépris des leçons du passé et des menaces qui pèsent sur l’avenir.

Lien vers le site du texte et de la pétition

Une fois de plus, il ne s’est rien passé à la centrale nucléaire de Fessenheim.

Une fois de plus, il ne s’est rien passé à Fessenheim.

« Ce n’est pas un accident nucléaire, ni même un incident, mais un accident du travail. » dit Thierry Rosso, le directeur de la centrale de Fessenheim qui hier soir ne s’en  expliquait pas les causes. La ministre de l’écologie, qui n’en sait pas plus sur le pourquoi de la chose, le répète et le Sénateur Jean Marie Bockel en profite pour faire parler de lui. Quant à moi, alors que je le sais depuis hier en début d’après midi, je n’ai pas participé au buz. Ce n’est pas d’une émotion passagère de plus accompagnée d’un circulez il n’y a rien à voir dont nous avons besoin.

On connaît la propension de l’industrie nucléaire au maquillage des faits. La firme nippone Tepco vient d’être obligée de reconnaître qu’elle avait retouché à l’aide de Photoshop les photos du réacteur 4 qui se trouvaient sur son site Internet.

Admettons que l’incident du mercredi 5 septembre à Fessenheim soit mineur.

Mineur ou pas, il n’aurait pas du advenir.

Surtout, il s’agit d’un incident de plus. Nous en sommes au 24ème en 6 mois.

Cela devrait suffire pour admettre que cette centrale connaît un phénomène d’usure et de vieillissement. Cela nous amène à la question – quasi mathématique – suivante : à partir de quel taux d’incidents mineurs passera-t-on à l’incident majeur puis à l’accident ?

Le gouvernement doit s’engager concrètement dans le respect de ses promesses. Si on veut que  la Centre de Fessenheim soit fermée au terme du quinquennat, c’est maintenant que la décision doit être prise.

Les associations qui militent pour la fermeture de la Centrale  ont été reçues par un conseiller technique du Ministre de l’Ecologie et de l’Energie.

« Elles ont constaté beaucoup de flou, puisque à ce jour la seule initiative prise par le ministère concernerait une étude portant sur l’approvisionnement électrique régional, dont l’échéance n’est pas encore annoncée. Alors que Fessenheim est parfois à l’arrêt pendant des mois (nombreuses pannes, maintenance, visites décennales…) sans que cela n’affecte notre approvisionnement. Les deux réacteurs ont été notamment arrêtés simultanément du 30 juillet au 6 novembre 2011 ». Voir leur communiqué.

Et aussi sur notre site.

Et pour rester Zen, rappelons le rendez-vous cycliste de ce week-end